Category: Finance

  • SVB : Les autorités américaines tentent de restaurer la confiance dans leur système financier

    Une forte vente des actions des banques régionales lundi après l’effondrement de la Silicon Valley Bank (SVB) et de la Signature Bank a mis les autorités américaines en posture de Défense. L’événement a envoyé des ondes de choc sur les marchés mondiaux, malgré les assurances du président américain Joe Biden et d’autres décideurs politiques selon lesquelles les banques et les dépôts étaient en sécurité.

    Lorsqu’une banque s’effondre, d’autres personnes craignent parfois que leurs propres banques et investissements ne suivent, créant le risque d’une panique bancaire, provoquant une contagion qui pourrait entraîner une faillite bancaire massive affectant l’ensemble de l’économie.

    La chute de SVB représente la faillite bancaire la plus importante depuis la crise financière de 2008. Cet événement a incité la FDIC (Federal Deposit Insurance Corporation) à adopter des mesures d’urgence pour protéger rapidement le système bancaire américain. Les régulateurs ont déclaré que les clients des banques en faillite auraient accès à tous leurs dépôts. Ils ont également mis en place une nouvelle facilité pour permettre aux banques d’accéder à des fonds d’urgence.

    Néanmoins, les inquiétudes concernant le secteur financier ont pesé sur les banques, non seulement en Amérique du Nord, mais aussi en Asie et en Europe, les actions du secteur atteignant un creux record. L’intervention de l’administration Biden souligne à quel point une campagne incessante de la Fed et d’autres grandes banques centrales pour combattre l’inflation met à rude épreuve le système financier et les marchés mondiaux.

    « Les Américains peuvent être assurés que notre système bancaire est sûr. Vos dépôts sont en sécurité », a déclaré Biden depuis la Maison-Blanche.

    La FDIC est une agence gouvernementale indépendante créée en 1933 pendant la Grande Dépression pour rétablir la confiance dans le système bancaire américain. L’agence garantit jusqu’à 250 000 $ par déposant, par type de propriété de compte et par institution financière. Ainsi, de nombreux déposants dont le solde est supérieur au montant garanti n’auraient pas de chance.

    Cependant, dimanche, la secrétaire au Trésor Janet Yellen, le président du Conseil de la Réserve fédérale Jerome Powell et le président de la FDIC Martin Gruenberg ont fait une déclaration pour rétablir la confiance dans le système bancaire, un secteur vital pour l’économie américaine.

    Les autorités ont approuvé des actions permettant à la FDIC de mener à bien sa résolution de SVB d’une manière qui protège pleinement tous les déposants et leur donne accès à leur argent d’ici le lundi 13 mars 2023. Cependant, les actionnaires de la Banque et certains créanciers non garantis n’étaient pas protégés.

    Pour protéger les déposants, la FDIC a transféré tous les dépôts et la quasi-totalité des actifs de Silicon Valley Bank à Silicon Valley Bridge Bank, N. A., une banque à service complet que la FDIC exploitera lors de la commercialisation de l’institution auprès d’enchérisseurs potentiels.

    Le président Biden a déclaré que le système bancaire est sûr et a noté les efforts pour limiter les retombées de l’effondrement de la Silicon Valley Bank. De nombreux législateurs, quant à eux, ont appelé à réexaminer les règles applicables aux banques de taille moyenne, tandis que d’autres ont déclaré qu’ils avaient besoin de plus d’informations avant d’agir. Mardi, le président de la commission des services financiers de la Chambre, Patrick McHenry, a appelé à la confiance dans le système bancaire du pays, affirmant que la Réserve fédérale et la FDIC agissaient dans le cadre de la loi après l’effondrement des deux banques américaines. « Les Américains doivent avoir confiance dans leur système financier », a déclaré le représentant Patrick McHenry à CNBC.

  • SVB : Les régulateurs travaillent sans relâche pour renflouer les clients

    Après la soudaine déroute de la Silicon Valley Bank (SVB), les régulateurs américains ont travaillé sans relâche tout au long du week-end sur un plan extraordinaire pour renflouer les clients.

    La Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), qui garantit jusqu’à 250 000 dollars par déposant par catégorie de dépôt, a pris le contrôle des dépôts de 175 milliards de dollars de la SVB. Selon le rapport annuel de SVB, la partie des dépôts non assurée se montait à environ 96 %.

    Toutefois, la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a noté que les responsables du gouvernement fédéral étaient « inquiets » pour les déposants et travaillaient sur des plans pour répondre à leurs besoins. L’agence américaine chargée de garantir les dépôts (FDIC) avait déclaré que les déposants assurés auraient accès à leur argent lundi.

    Au cours des deux derniers jours, les responsables du Trésor, de la Réserve fédérale et de la FDIC ont travaillé avec l’administration Biden pour élaborer un plan de sauvetage afin de garantir tous les dépôts non assurés détenus par les clients de la SVB.

    Par ailleurs, le secrétaire au Trésor a souligné que le système bancaire américain est sûr et bien capitalisé. Elle a également déclaré que le gouvernement ne sauverait pas SVB tout en laissant entendre que les régulateurs envisageaient diverses options pour l’institution, y compris des acquisitions.

    La FDIC a ouvert dimanche une vente aux enchères pour les offres d’acquisition de la banque, a déclaré le département du Trésor lors d’un briefing avec les législateurs de la délégation californienne.

  • Silicon Valley Bank : la plus grande faillite bancaire américaine depuis 2008

    Vendredi, la Silicon Valley Bank, un prêteur axé sur la technologie, a fait faillite à la suite d’une ruée sur les dépôts après que les actions de sa société mère aient chuté d’un record de 60 % mardi. En 48 heures, une panique provoquée par la communauté du capital-risque que SVB avait servie et nourrie a mis fin aux 40 ans d’activité de la banque. Les régulateurs ont fermé SVB et saisi les dépôts lors de la plus grande faillite bancaire américaine depuis la crise financière de 2008 et la deuxième plus importante jamais enregistrée. L’incident a envoyé des ondes de choc dans le secteur de la technologie et au-delà.

    Se qualifiant de partenaire financier de l’économie de l’innovation, SVB a été fondée en 1983 en Californie et est rapidement devenue la banque du secteur technologique en plein essor. SVC était la banque de près de la moitié de toutes les startups américaines soutenues par du capital-risque en 2021. C’est également un partenaire bancaire pour de nombreuses sociétés de capital-risque qui ont financé ces startups.

    La Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), qui garantit jusqu’à 250 000 dollars par déposant et par catégorie de dépôts, a pris le contrôle des dépôts de 175 milliards de dollars de SVB. Soutenue par la pleine confiance des États-Unis, la FDIC a déclaré que les déposants assurés auraient accès à leur argent lundi. Les clients avec plus que le montant assuré par la FDIC dans SVB ont joué de malchance. La secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, a déclaré que la SVB était l’une des rares banques qu’elle « surveillait de très près ».

    La 16e banque américaine, ayant vu ses dépôts diminuer pendant l’hiver du capital-risque, n’avait pas réussi à lever suffisamment de liquidités pour rester à flot. Selon les documents réglementaires californiens, les clients ont retiré un montant stupéfiant de 42 milliards de dollars de dépôts d’ici la fin de jeudi. À la fermeture des bureaux ce jour-là, SVB avait un solde de trésorerie négatif de 958 millions de dollars.

    La spirale descendante de la société a commencé mercredi soir, lorsque sa société mère, SVB Financial Group, a surpris les investisseurs en annonçant qu’elle devait lever 2,25 milliards de dollars pour consolider son bilan après avoir subi des pertes importantes. En plus de lever des fonds en vendant des actions, SVB a également tenté de se vendre.

    La réaction a afflué de plusieurs analystes qui ont discuté du risque de liquidité de la banque. L’annonce a effrayé les investisseurs et fait plonger les actions de la société, alors même que le PDG de la banque, Greg Becker, exhortait les clients à rester calmes.

    Vendredi soir, des signes de stress chez SVB se sont propagés à d’autres parties du monde financier. Par exemple, Circle, la société de paiement qui gère USDC, une société américaine de cryptomonnaie qui rattache sa monnaie numérique « stable » au dollar, a perdu son ancrage au dollar à un niveau record samedi matin. La société a confirmé qu’environ 8 % soit 3,3 milliards de dollars de ses réserves de 40 milliards de dollars étaient avec SVB.

    À l’extérieur de la frontière américaine, la société de technologie publicitaire basée à Toronto AcuityAds a 55 millions de dollars en dépôts chez SVB et seulement 4,8 millions de dollars dans d’autres banques. Cette société est en difficulté.

  • Le président de la Fed américaine, Powell, relève les prévisions de taux

    Aux États-Unis, la pression inflationniste est plus élevée que prévu. Mardi, le président de la Réserve fédérale, Jerome Powell, a déclaré au Comité sénatorial des banques que ramener l’inflation à l’objectif de 2 % de la banque centrale avait « un long chemin à parcourir et sera probablement cahoteux ». En conséquence, la banque centrale est susceptible de relever ses taux plus haut que prévu pour lutter contre l’inflation.

    Le taux d’inflation annuel aux États-Unis est de 6,41 %, contre 6,45 % le mois dernier et 7,48 % l’an dernier. Néanmoins, selon la Fed, d’un point de vue plus large, l’inflation s’est quelque peu modérée depuis le milieu de l’année dernière. Toutefois, il reste bien au-dessus de l’objectif à long terme de 2 % du FOMC (Federal Open Market Committee).

    M. Powell a déclaré que l’inflation et l’embauche plus élevées pourraient amener les responsables de la banque centrale à modifier leur stratégie récemment adoptée consistant à augmenter les taux par tranches plus petites d’un quart de point, ouvrant la porte à une augmentation plus considérable des taux d’intérêt d’un demi-point ce mois-ci.

    Cet avertissement belliciste du président de la Fed, Jerome Powell, selon lequel la banque centrale pourrait accélérer les hausses de taux d’intérêt, a anéanti l’espoir que la Fed commencerait à assouplir sa politique agressive de taux d’intérêt de sitôt.

    Suite à la nouvelle, la réaction des marchés à terme sur les taux d’intérêt a été rapide. Quant aux contrats à terme sur actions américaines, ils sont relativement stables après une vente après le témoignage de M. Powell au Sénat, indiquant que les taux d’intérêt pourraient devoir augmenter plus que prévu.

    Les investisseurs prêteront une attention particulière à la publication vendredi des données sur l’emploi de février après l’annonce que la masse salariale non agricole de janvier s’élevait à plus de 517 000, soit nettement plus que les attentes de 187 000. La semaine prochaine, les investisseurs obtiendront également de nouvelles données sur l’inflation des prix à la consommation et de gros, une semaine seulement avant la prochaine réunion politique de la Fed.

    Pendant ce temps, le dollar américain a atteint un plus haut de trois mois contre un panier de devises, l’indice du dollar américain ayant atteint 105,65. L’euro a perdu 1,2 % face au dollar à 1,05 $. Quant à la gourde, la monnaie haïtienne maintient sa baisse constante face au dollar alors que les activités économiques sont au point mort alors que les inquiétudes sécuritaires augmentent.

  • Eddy Allexandre plaide coupable à un stratagème de près de 250 millions de dollars pour frauder des investisseurs

    EDDY ALEXANDRE, le PDG d’une prétendue plateforme de trading de cryptomonnaie et de devises appelée EminiFX, a plaidé coupable de son rôle dans une fraude présumée qui, selon les procureurs fédéraux, a dupé des investisseurs de millions de dollars.

    M. Alexandre de Valley Stream, New York, a sollicité près de 250 millions de dollars d’investissements auprès de dizaines de milliers d’investisseurs, principalement des Haïtiens, après avoir fait de fausses déclarations en rapport avec sa plateforme de trading EminiFX.

    Le PDG de 51 ans a été arrêté en mai 2022 et inculpé de fraude électronique et de fraude sur les marchandises, pour lesquelles il a initialement plaidé non coupable. Ce vendredi, il a changé son plaidoyer de culpabilité. Le juge de district John P. Cronan a accepté son plaidoyer.

    L’avocat américain Damian Williams a déclaré : « Eddy Alexandre a admis aujourd’hui avoir attiré des investisseurs dans son escroquerie d’investissement en cryptomonnaie en fabriquant des rendements hebdomadaires d’au moins 5 % à l’aide d’un » compte assisté par Robo-Advisor « pour effectuer des transactions.

    Selon les allégations contenues dans l’acte d’accusation et d’autres documents déposés et déclarations faites devant le tribunal, M. Alexandre n’a pas investi une partie substantielle de l’argent de cet investisseur et a même utilisé certains fonds pour des achats personnels.

    Par exemple, M. ALEXANDRE a détourné au moins environ 14 700 000 $ dans son compte bancaire personnel. Il a également utilisé 155 000 $ de fonds d’investisseurs pour s’acheter une BMW et a dépensé 13 000 $ supplémentaires de fonds d’investisseurs pour les paiements de voitures, y compris à Mercedes Benz.

    Le PDG a accepté de payer une confiscation d’un montant de 248 829 276,73 $, ainsi qu’une restitution d’un montant à déterminer par le tribunal. Ce délit de fraude est passible d’une peine maximale de 10 ans de prison.

  • Le conseil d’administration du FMI approuve un décaissement de 105 millions de dollars en faveur d’Haïti

    Le conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) a approuvé le 23 janvier 2023 un décaissement de 81,9 millions de DTS (105 millions de dollars) en faveur d’Haïti, au titre du guichet « chocs alimentaires » de la facilité de crédit rapide, afin d’aider le pays à répondre aux besoins urgents de financement de sa balance des paiements qui découlent de la crise alimentaire mondiale.

    Selon le communiqué de presse, la flambée des prix des denrées alimentaires n’a fait qu’aggraver la situation de la population haïtienne, qui souffrait déjà de malnutrition sévère et d’insécurité alimentaire avant le déclenchement de la guerre en Ukraine.

    Haïti subit de plein fouet le choc mondial sur les prix des denrées alimentaires. L’inflation record a aggravé la fragilité d’Haïti, car la hausse des prix au niveau mondial s’est fortement répercutée sur les prix intérieurs et a occasionné des pénuries alimentaires. Haïti, dont plus de la moitié de la population est déjà en dessous du seuil de pauvreté, traverse une crise humanitaire dramatique ; au cours de l’exercice 2023, le pays devrait connaître un déficit de financement d’au moins 105 millions de dollars (0,5 pour cent du PIB), en supposant une compression de ses importations, et faute d’un financement extérieur supplémentaire de la part de ses partenaires pour le développement.

    Au terme des délibérations du conseil d’administration, Madame Antoinette Sayeh, directrice générale adjointe et présidente par intérim, a fait la déclaration suivante :

    « Haïti traverse une grave crise humanitaire et subit de plein fouet le contrecoup économique de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. L’inflation record a exacerbé la fragilité d’Haïti et ravivé les souffrances d’une population déjà touchée par des formes sévères de malnutrition. Le gouvernement s’emploie à atténuer les effets des hausses des prix des produits alimentaires et à étendre les dispositifs de protection sociale ».

  • Désharmonisation entre le secteur bancaire et le secteur réel en Haïti: quand la finance boude la production

    « Les banques sont les meilleurs moteurs jamais inventés pour stimuler la croissance économique » Alexander Hamilton (1781).

    La littérature sur la relation existant entre la finance et la croissance de la production de biens et services est légion. Ross Levine, en 2005, a publié une étude classique (Finance and Growth: Theory, Evidence, and Mechanisms) qui compte près de 300 références ; plus de 100 documents ont été rédigés après 2005. La plupart de ces recherches, de Walter Bagehot (1873) à Marco Pagano (2013), ont abouti à la conclusion que le développement financier (mesuré, entre autres, par le ratio crédit privé/ produit intérieur brut) est une condition sine qua non au développement économique. Notamment, au travers de son impact sur l’investissement, l’innovation technologique, la productivité des facteurs de production et donc, sur la croissance économique.

    Levine (1997) définit la fonction essentiellement d’un système financier comme la facilitation de l’allocation des ressources à travers le temps et l’espace. Pour John Maynard Keynes, la monnaie est indissociable de la production marchande ; ce sont les deux éléments constitutifs du fonctionnement de l’économie. La monnaie est créée à partir du financement de l’activité économique. Tandis que, du côté des classiques, c’est la dichotomie. Selon David Ricardo, la monnaie ne participe pas à la formation de l’équilibre économique ; elle ne détermine que le niveau absolu des prix. Ce dernier est déterminé indépendamment de l’échange réel par la quantité de monnaie en circulation.

    Après cette entrée en matière, on peut se demander comment la situation se présente-t-elle en Haïti.

    L’économie haïtienne est caractérisée par cette dichotomie dont parlent les classiques dans la mesure où on observe ce que la Banque de la République d’Haïti (BRH) désigne comme la « non-intégration des sphères financières et réelles ». D’un côté, nous avons un système bancaire considéré comme performant, sain et solide. Alors que, de l’autre côté, le secteur réel est enfermé dans une trappe à faible croissance. Pour Edouard Francisque (PhD), ce secteur souffre de « nanisme économique ». La non-intégration du secteur bancaire dans le tissu de production a été dénoncée par Marc Louis Bazin (Le Nouvelliste, 2008) :

                Le secteur bancaire ne finance pas le développement. Pratiquement 50 % des prêts des banques commerciales vont au commerce et à la consommation. Les prêts à l’investissement productif, à l’agriculture et aux transports ne représentent que 10 % du total des prêts que consent le secteur bancaire. La part du crédit qu’accordent les banques est la plus faible de la Caraïbe (11 %). 

    En effet, à partir des données de la BRH, on constate que, de 1994 à 2019, le volume des actifs du secteur bancaire haïtien, composés de bons BRH et autres placements, des immobilisations, des disponibilités et du portefeuille de crédit net, n’a cessé de croître pour atteindre 401.95 milliards de gourdes en 2019 ; avec une croissance moyenne annuelle de 17.03 %. Il est à noter que la variation à la hausse du taux de change augmente la valeur nominale des actifs libellés en dollars lorsque ces derniers sont convertis en gourdes. Les dépôts captés auprès des clients ont atteint une valeur d’environ de 324.5 milliards de gourdes et ils ont augmenté à un taux de croissance moyen, sur la période, de 17.43 %. Les dépôts à vue, les dépôts d’épargne et les dépôts à terme croissent en moyenne au rythme de, respectivement, 19.3 %, 14.2 % et 18 %. Cependant en termes d’intermédiation, l’activité des banques ne s’est pas intensifiée. Le ratio des prêts nets accordés par les banques sur les dépôts recueillis est en moyenne de 39.48 % sur cette période. Il est passé de 53.2 % en 1997 à 38.4 % en 2019.

    En ce qui a trait au poids de certains secteurs dans la répartition du crédit total accordé par le secteur bancaire haïtien, on constate que, de 2000 à 2019, dans le souci de réduire les risques liés à l’octroi de crédit, le secteur agricole (agriculture, sylviculture et pêche), l’industrie alimentaire et l’hôtellerie ont reçu respectivement 0.31 %, 4 % et 1.98 % de l’enveloppe des prêts bancaires. Alors que, les activités de commerce de gros et de commerce de détail dominent la distribution du crédit en recevant respectivement 14.84 % et 13.81 % sur la même période. Les crédits à la consommation représentent 10.74 % de l’ensemble des crédits accordés au cours de ces vingt années.

    De 1994 à 2019, on voit que les revenus et les bénéfices nets des banques ont une tendance haussière sur toute la période, mais elle a été interrompue par les fortes turbulences politiques au cours de l’année 2018. Cependant, on remarque que les autres revenus croissent plus vite que les revenus d’intermédiation. Les autres revenus, comme les gains de changes et les commissions, ont dépassé les revenus d’intermédiation à partir de 2010. Les revenus nets d’intérêt ont un taux de croissance moyen de 18.22 % alors que les autres revenus augmentent à un rythme de 19.89 %. En effet, ces dernières années, les banques utilisent plus de ressources pour la réalisation des opérations de change (achat et vente de devises).

    Qu’en est-il du secteur réel ?

    Le rachitisme de l’économie haïtienne peut être observé à travers l’évolution de son produit intérieur brut (PIB réel), exprimé en milliards de gourdes réelles, ou encore son taux de croissance. Les seules années où le pays a dégagé un taux de croissance économique de plus de 5 % sont 1995 et 2011, respectivement, 9.9 % et 5.5 %. Deux années de reprise économique qui ont succédé les chocs du début des années 90 et de 2010. De 1990 à 2019, le taux moyen de croissance économique est de 0.88 % alors que la taille de la population a crû au rythme de 1.6 % sur la période. Ce qui implique que le taux de croissance de l’économie haïtienne ne suffit pas à améliorer significativement le niveau de vie de la population mesuré par le revenu national brut par habitant, qui est, en moyenne, de 734 dollars US constants. En plus, le taux de chômage, en pourcentage de la population totale, est de 11.63 % sur la période. 

    De nos jours, le concept de pays en voie de développement est plus utilisé que celui de pays sous- développé. Mais, selon l’économiste Frtiz Jean Jacques, Haïti ne mérite pas l’appellation de pays en développement, car nous sommes trop loin derrière. Pour lui : « Une économie sous-développée est reconnaissable par l’importance de son PIB, mais beaucoup plus évidemment par ces caractéristiques réelles » (Jean Jacques, 2015). Nous avons un PIB moyen, en dollars US constants de 2010, de l’ordre de 6.67 milliards de 1990 à 2019 et un PIB par habitant de 756 dollars en 2019. Haïti est le pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental avec un indice de développement humain le classant 169e sur 189 pays en 2019. De plus, l’industrie ne compte pas assez dans la formation du produit intérieur brut. 

    À partir des données en séries temporelles allant de 1990 à 2019, en utilisant des outils statistiques et économétriques, on constate que le coefficient de corrélation simple (qui mesure le degré de liaison entre deux variables) entre les crédits accordés au secteur privé et le taux de croissance du PIB réel est faiblement significatif d’un point de vue économique alors que la corrélation entre les crédits bancaires et le taux d’investissement est statistiquement nulle.

    À l’aide d’un modèle de régression multiple, on trouve qu’une variation positive de 1 % des crédits privés accordés par les banques commerciales haïtiennes, en pourcentage du PIB, fait augmenter le taux de croissance de la production réelle de 10.67 %. En regard au seuil de significativité, on peut dire que l’effet des crédits sur le taux de croissance de l’économie est faiblement considérable. En effet, une hausse de 0.01 des crédits au secteur privé augmente ce taux de croissance de seulement de 0.1 point de pourcentage. Tandis que l’utilisation d’un modèle vectoriel autorégressif, afin de tenir compte du biais de simultanéité, montre que les crédits accordés aux entrepreneurs et consommateurs privés, pour la période étudiée, ne prédisent pas une évolution positive du taux de croissance réel de l’économie haïtienne (pour plus de détails, consultez le lien suivant : https://academia.edu/resource/work/81927243).

    Comment expliquer cette désharmonisation ?

    Plusieurs facteurs peuvent expliquer la non-intégration du système bancaire haïtien dans le tissu de production. Ici, on va tenir de deux facteurs jugés déterminants dans la désintermédiation financière : l’incertitude découlant de l’instabilité chronique en Haïti et le faible revenu moyen des ménages.

    L’incertitude constitue un poison virulent, non seulement pour l’activité économique, mais aussi pour l’activité financière. En effet, lorsque les banques sont pessimistes, elles sont plus réticentes à accorder du crédit et elles endurcissent leurs exigences. Par conséquent, l’accès aux ressources monétaires permettant le financement des investissements devient plus cher donc, plus difficile. L’instabilité chronique en Haïti et l’absence de modernisation du secteur agricole, qui est soumis aux alinéas climatiques (cyclone, sécheresse) sont sources d’incertitude. L’activité productive se déroule dans un environnement caractérisé par l’insécurité, l’instabilité politique, une vulnérabilité face aux catastrophes naturelles et une mauvaise organisation territoriale. Alors, les banques commerciales préfèrent s’orienter vers des activés offrant certaines garanties telles que les opérations de change (achat et vente de devises), l’achat d’obligations et de bons du trésor et les activités commerciales au détriment du financement de la production de biens et services.

    Les banques, en tant qu’entreprises, ont pour objectif principal d’accroître les avoirs des actionnaires en rémunérant leurs capitaux à un taux plus élevé que le coût d’opportunité de ces derniers (Lhermite, 2003), en gérant et en se servant de l’argent des autres. Elles sont donc tenues d’être prudentes et vigilantes quant à l’utilisation des fonds recueillis. Alors, elles cherchent à réduire les risques en finançant, de préférence, les opérations commerciales qui consistent à importer et revendre des biens indispensables à la consommation. Ce qui explique, en partie, que, les activités de commerce de gros et de commerce de détail dominent la distribution du crédit.

    Selon Jesùs Huerta De Soto (Monnaie, banque, crédit bancaire et cycles économiques, 2011), pour accorder des crédits sains (c’est-à-dire moins risqués, ne générant pas l’accroissement démesuré de la masse monétaire), les banques commerciales ont besoin de constituer des réserves correspondantes garanties par les dépôts bancaires.

    En Haïti, le faible niveau du revenu moyen des ménages résultant, entre autres, d’une activité économique en détresse, d’une faible productivité, face à une forte pression de la population consommatrice, inhibe la formation d’une épargne destinée au financement des biens d’investissement (facteur de production). La faiblesse de l’épargne est l’une des causes  fondamentales de la stagnation économique. Les ménages, ne disposant pas assez de revenus, sont obligés de consommer immédiatement leurs ressources monétaires pour satisfaire leurs besoins. Les chiffres ci-dessus montrent que les dépôts à vue croissent plus vites que les dépôts d’épargne et les dépôts à terme. Ce qui peut contrarier l’octroi de crédit à long terme par les banques pour financer l’investissement. En effet, ces dernières accordent plutôt des crédits à court terme seulement à des commerçants ayant un chiffre d’affaires considérable et offrant des garanties très solides.

    Le Dr. Edouard Francisque a raison de dire que « l’absence de flux monétaires continus est un facteur de blocage structurel de l’économie d’Haïti où coexistent deux secteurs juxtaposés mais non intégrés ». Suite à ce constat, il est pertinent de faire quelques suggestions. Ainsi, on recommande :

    • À l’État haïtien de jouer son rôle en travaillant à l’établissement d’un environnement favorable à l’investissement. Notamment, en réduisant les incertitudes liées à l’évolution de l’activité économique et en réaménageant le territoire.
    • Au Bureau d’Information sur le Crédit (BIC) et au Centre de Facilitation des Investissements (CFI) de travailler conjointement afin de jouer un rôle plus significatif dans la rencontre des entrepreneurs ayant des projets générateurs de croissance économique et des agents à capacité de financement qui désirent investir.
    • À la Banque de la République d’Haïti de revoir ses programmes d’incitation afin de stimuler davantage les banques commerciales à attribuer plus de ressources à l’octroi de crédits que les autres activités de non-intermédiation.
    • Aux autorités économiques et financières de travailler à la création d’une banque de développement afin de combattre l’exclusion financière en octroyant des crédits accompagnés (suivi et contrôle) aux investisseurs avec des projets rentables financièrement et économiquement.

    Rédigé par Roobens CANGÉ

    Économiste

    Email : roobenscange@gmail.com

    Références Bibliographiques

    FRANCISQUE Edouard, 2014. La Structure Économique et Sociale d’Haïti, un Essai d’Interprétation, C3 Editions, Pétion-Ville, 328 p.

    JEAN JACQUES Fritz, 2015. L’Économie Haïtienne, État et Stratégie de Développement, Editions Oracle, Montréal (Québec), 267 p.

    KEYNES John Maynard, 1936. General Theory of employment, Interest and Money; trad. fr. DE LARGENTAYE Jean, 2017. Théorie Générale de l’Emploi, de l’Intérêt et de la Monnaie, Ed. Payot & Rivages, Paris, 489 p.

    LEVINE Ross, 1997. Financial Development and Economic Growth: Views and Agenda, [Journal of Economic Literature, Juin, Vol. 35, p. 688 à 726.

    LEVINE Ross, 2005. Finance and Growth: Theory, Evidence, and Mechanisms, in [Handbook of Economic Growth, Elsevier B.V., ed. by Phillipe Aghion and Steven N. Durlaf, p. 865 à 934.

    LHERMITE François, 2003. Performance et Situation  des Banques dans l’Economie Haïtienne, L’accès, 1ere éd., 364 p.

    PANIZZA Ugo, 2014. Développement Financier et Croissance Economique : les Connus Connus, les  Inconnus Connus et les Inconnus Inconnus, De Boeck Supérieur, Février, Vol. 22, p. 33 à 66.

    Sources de données

    Banque de la République d’Haïti (BRH)

    Banque Mondiale.

  • Budget rectificatif 2021 : recettes totales réduites de 27%

    Après une année catastrophique de mobilisation des recettes fiscales, le gouvernement haïtien a publié au Journal Officiel la loi de finances rectificative pour l’exercice 2020-2021. Il s’agit du cinquième budget rectificatif depuis l’exercice 2014-2015. Les recettes fiscales totales sont de 27 % inférieures aux prévisions. En conséquence, l’enveloppe globale est réduite de 61,7 milliards de gourdes soit 24 %.

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    Attendant à une croissance positive du PIB cette année, le gouvernement avait prévu de dépenser un record de 254,7 milliards de gourdes, soit 28 % de plus que l’année précédente. Cependant, au lieu de croître, l’économie s’est contractée. Le PIB de cette année baissera pour la troisième fois consécutive.

    Les prévisions de croissance et de dépenses faites par le gouvernement dans son plan budgétaire initial pour l’exercice 2020-2021 ne se matérialiseront pas. Le gouvernement n’aura alors à dépenser que 193 millions de gourdes, soit 24 % de moins que le montant initial. En fait, l’État devrait enregistrer un déficit budgétaire record.

    Les dispositions relatives aux ressources sont modifiées. Selon le budget rectificatif, les recettes douanières, qui constituent la principale source de revenus de l’État, sont loin du montant prévu. Elles sont passées de 32,9 millions de gourdes à 22,5 milliards, soit près de 32 % de moins.

    Alors que la plupart des économies du monde se remettent du choc économique causé par la crise sanitaire mondiale, l’économie haïtienne se contractera en raison des troubles politiques et de la violence des gangs. Le climat des affaires a été paralysé tout au long de l’année. En conséquence, le gouvernement n’a pas été en mesure de collecter suffisamment d’impôts pour financer son budget initial.

    Alors que le gouvernement annonce que le budget rectificatif prévoit un cadre financier pour l’exercice prochain dans le contexte des besoins découlant des récents chocs, les perspectives économiques demeurent incertaines. Le Grand Sud nécessite des interventions majeures pour sortir des décombres du séisme. Les incertitudes politiques et la prolifération des gangs entravent toute reprise économique.

  • La nouvelle centrale électrique de Port-de-Paix attaqué

    Le directeur général de l’Électricité d’Haïti (EDH), Michel Présumé, a tweeté que des individus non identifiés avaient attaqué la nouvelle centrale électrique de Port-de-Paix.

    Cette nouvelle installation construite sous la présidence de Jovenel Moïse est une centrale hybride (solaire et diesel) située à La Saline, au Nord-Ouest, aux environs de Port-de-Paix. Les travaux de construction ont débuté le 16 octobre 2020.

    L’attaque a eu lieu dans la soirée du dimanche 13 août 2021 sur la centrale électrique qui a été conçue pour fournir de l’électricité à une grande partie du département du Nord-Ouest.

    Des dommages et des vols d’équipements tels que des batteries utilisées pour démarrer des générateurs et des batteries d’onduleurs ont été constatés.

    Selon le tweet de M. Présumé, EdH demande aux autorités judiciaires et à la police de l’aider à éclaircir cette affaire le plus rapidement possible.

  • MTPTC recevra 44 milliards, quelles sont vos attentes?

    Le budget est l’un des outils les plus importants dont dispose le gouvernement pour s’acquitter de ses responsabilités. Allouer judicieusement les ressources est vital pour un pays aussi sous-développé comme Haïti. Le gaspillage et la mauvaise gestion représentent certains des plus grands défis du pays avec des dizaines d’institutions fournissant des services publics à la population. L’une de ces institutions est le Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications (MTPTC) qui consommera près d’un cinquième du budget 2020-2021.

    Le MTPTC consommera la plus grande partie du budget d’Haïti. Avec onze entités dont des institutions vitales telles que la CONATEL, le CNE et la DINEPA sous ses ailes, le ministère absorbera plus de 44 milliards de gourdes, soit plus de 17% des 254 milliards de gourdes du budget de la république d’Haïti pour l’exercice 2020-2021. Sur le montant total alloué au MTPTC, 42,5 milliards de gourdes sont destinées aux investissements et 1,7 milliard de gourdes au fonctionnement.

    Au cours des 5 derniers exercices, le MTPTC a reçu près de 100 milliards de gourdes et a été responsable de plus de 140 projets financés par les fonds Petrocaribe entre 2008 et 2016. Pour mettre cela en perspective, les programmes et projets financés par les fonds Petrocaribe s’élèvent à 110 milliards de gourdes sur une période de 8 ans.

    Évolution de l’inflation mensuelle

    Budget du MTPTC en milliards de gourdes

    Source : Ministère de l’Economie et des Finances (MEF)

    Il faut rappeler que la mission du MTPTC est la suivante : « Le Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications est l’Organisme central ayant pour missions de concevoir, définir et concrétiser la Politique du Pouvoir Exécutif dans les domaines Travaux Publics, Transports, Communications, Eau Potable, Energie et dans tous les autres domaines existants par la loi ».

    Si l’allocation des ressources du budget d’un pays reflète les priorités de la nation, les preuves sur le terrain prouvent le contraire en Haïti. Port-au-Prince est l’une des villes les plus sales du monde sans infrastructure fonctionnelle. Le pays dispose d’un réseau routier inadéquat et les communications sont pour le moins médiocres. L’eau portable est un luxe. Le taux d’accès à l’électricité figure parmi les plus bas du monde. Même la capitale haïtienne n’a pas de système d’égouts fonctionnel. Une pluie d’une heure inonde la capitale avec la plupart des routes inaccessibles.

    Dans la loi de finances issue du Conseil des ministres la semaine dernière, le budget du MTPTC a été augmenté de plus de 18 milliards de gourdes, soit 69% de plus par rapport à l’année précédente. En conséquence, l’argent alloué au MTPTC équivaut à environ de 7% du produit intérieur brut (PIB) d’Haïti.

    Alors que la population haïtienne attendra beaucoup d’un ministère aussi important, il est difficile d’imaginer que l’allocation de 17% des ressources du pays aidera le Ministère des Travaux Publics, Transports et Communications à accomplir plus que ce qu’il a fait dans le passé, selon des antécédents de mauvaise gestion, corruption et manque de résultats.

    Que pensez-vous du budget du MTPTC? Quelles sont vos attentes? Faites-nous savoir dans la section commentaires ci-dessous.