Port-Au-Prince,
le 27 Mai 2019
A l’Honorable Député Gary BODEAU,
Président de la Chambre des Députés,
Et aux Honorables Membres du Bureau.
Honorables Collègues,
Que la présente soit la traduction fidèle du désarroi rongeant le quotidien
du peuple Haïtien, et ma consternation face à l’inaction du Pouvoir Législatif.
Honorable Président, Honorables membres du bureau, la décadence galopante
des conditions de vie de la population Haïtienne, a dépassé les orées de
l’absurde, et j’ai passé deux ans à poser ces questions aux collègues Députés :
« En sommes-nous conscients ?» Serions-nous devenus déficients de nos sens et
facultés, à comprendre les conjonctures, la réalité, et agir dans le sens d’un
palliatif graduel, et des solutions durables certaines.
Le synopsis que je m’apprête à vous dresser n’est autre qu’un secret de
polichinelle. Mais, vous m’aurez permis cette redondance, par nécessité de
rappel. Rien n’a été sublime hier, mais aujourd’hui, honte à nous, dirigeants
et acteurs, de constater ce bouquet de cauchemars et de mésaventures qu’a reçu
le peuple. Nos rues sont des dépotoirs à ciel ouvert, notre environnement
non-entretenu n’est qu’un cancer sur mesure, d’ailleurs nous traversons
quotidiennement des montagnes d’immondices en toute quiétude pour nous rendre
au Parlement. Peu de pluie accouche une mer d’alluvions, inonde nos villes,
corrode nos campagnes; et la saison cyclonique est à nos portes. Les risques
sismiques demeurent, nous y sommes pleinement exposés. Pourtant, cette
rencontre au sujet desdits risques dont j’ai été l’instigateur, organisée au
Parlement avec les représentants du Gouvernement reste sans suivi. La dépréciation
vertigineuse, fulgurante de la gourde mortifie les commerces, et ravale le
pouvoir d’achat de la masse, et des salariés. Les employés et personnels des
institutions publiques et privées, en particulier les Professeurs, Policiers,
Personnels de Santé, n’ont aucun moyen de vivre dans la décence ; ils sont
mal-payés, et exercent leurs métiers au mépris de l’encadrement de l’Etat. Les
jeunes sont démunis, et croupissent dans le chômage et la misère. Après leurs
études, nos jeunes diplômés peinent à mettre leur savoir au service du pays, en
particulier ces jeunes professionnels de la santé ayant effectué leurs études à
l’étranger qui, souvent, font face à d’énormes difficultés pour intégrer le
système de santé du pays. Les étudiants des écoles privées et publiques
confrontent régulièrement à de nombreux obstacles. Et, actuellement, les cris
de nos courageuses étudiantes des Ecoles Nationales d’Infirmières, notamment
les revendications des étudiantes de l’Ecole Nationale d’Infirmières de la
ville des Cayes, doivent, de toute urgence, constituer l’objet de nos
préoccupations.
Les Paysans sont laissés pour compte, vivotent dans la précarité, sans brin
d’accompagnement. Et, n’en parlons pas, de l’insécurité partout sur le
territoire national, avec tout ce qu’elle charrie: incendies de marchés, vols,
tueries, anarchisme, et viols sur nos sœurs, nos enfants et nos jeunes, nos
valeureuses femmes du ghetto ainsi que nos paisibles étudiantes. A chaque jour
des cadavres jonchent nos rues ; ces derniers temps, plusieurs policiers sont
tués, dont un Inspecteur, pas plus tard qu’hier : pourtant le CSPN reste
serein. L’Etat ne contrôle rien, tout lui échappe ; les services des
institutions publiques et privées à l’instar des compagnies de téléphonie, ne
sont pas suffisamment contrôlées. Les Collectivités Territoriales sont traitées
en parents pauvres. Et malgré le blocage des projets des CASEC, le blocage des
projets inscrits dans les budgets, la Caravane passe, en toute quiétude, sans
lueur de changement. Voilà le constat!
Tout cela argumente la nécessité de convocation. Moi, pour ma part,
j’encourage les différents blocs et groupes de Députés à réfléchir sur les
actions nécessaires à poser. C’est pour cela que je suggère au Bureau de
convoquer les Députés à une rencontre spéciale afin de décider de notre action
comme institution. Il nous faut une décision expéditive du Pouvoir Législatif,
pour forcer chaque institution en ce qui la concerne, à agir sur les
problématiques, sans délai, pour des solutions adéquates et urgentes.
Si aucun miracle ne présage la possibilité de changer les choses, nous n’en
serions point innocentés.
Nul besoin d’attendre la prochaine marche, la prochaine manifestation, le
prochain déferlement populaire à l’exemple du 6 et 7 juillet 2018, le prochain
“pays lock”, pour sursoir à nos pensées électives, de prochain
mandat, pour prendre une décision historique salvatrice, susceptible de relever
le niveau de la 50ème Législature, et du coup écrire une page d’histoire.
Si rien n’est fait, il adviendra l’innommable, suite à ce chaos généralisé,
ce désordre institutionnalisé, cette rageuse gangrène.
Espérant, incessamment, que ladite convocation sera faite, Honorable
Président, Honorables Membres du Bureau, recevez mes hautes considérations.
Patriotiquement vôtre, Jude JEAN, Député du Peuple,
Circonscription de Boucan Carré,
50ème Législature