Le tourisme
constitue un levier efficace pouvant stimuler la croissance et résorber le taux
du chômage. Il s’impose comme un secteur à haut potentiel, un véritable
gisement de richesses et l’une des seules possibilités viables de
diversification économique pour les pays en voie de développement en
particulier.
Au niveau
macroéconomique, la part du tourisme dans le PIB mondial est de l’ordre de 10%
et sa contribution directe toujours dans le PIB mondial est de 3,1%. (
Organisation Mondiale du Tourisme 2017).
De par son
caractère transversal, le tourisme crée des effets multiplicateurs et des
effets d’entrainement substantiel sur d’autres secteurs dans la mesure où il
favorise l’émergence d’autres industries en soutenant le développement des
industries locales, et il transforme les structures économiques et sociales
pouvant élargir la base de l’essor économique en stimulant la production
intérieure.
Malgré toutes ces
potentialités, c’est un secteur d’activité très fragile dans la mesure où les
recettes touristiques sont affectées négativement au moindre problème lié à
l’insécurité, l’insalubrité ou encore les troubles socio-politiques.
Par rapport à
cela, l’on peut se demander pourquoi soutenir un tel secteur dans un pays comme
Haïti où les crises, les instabilités sont récurrentes, résurgentes voire constantes
?
Telle est
l’épineuse question à laquelle on veut tenter d’apporter quelques éléments d’explication
à travers ce papier.
Haïti faisait
partie des premières destinations touristiques de la caraïbe dans les années 50
notamment avec les vagues de croisières d’hiver. Cela lui a valu le surnom de la perle des
Antilles.
En 1951, plus
10788 touristes ont visité le pays. 4 ans plus tard, ce nombre passait à 24
831.
Durant les années
60 et 70, le pays figurait parmi les destinations les plus prisées de ladite
région.
Plus tard, soit
dans les années 1972, le pays a reçu un total de 67625 touristes.
En 8 ans soit de
1951 à 1959, le nombre de touristes de séjour a été multiplié par plus de 8
selon Paul Moral. Le pays offrait à ses visiteurs ses produits de tous genres
mais aussi les éléments qui lui sont propres.
Vers les années
1979, Haïti excédait les 300000 touristes selon Sarrasin & Renaud 2014.
Plus près de
nous, 2012 a été une année durant laquelle plusieurs initiatives ont été prises
en faveur de l’émancipation de ce secteur notamment au niveau de l’aménagement
de certains sites et le choix de zones de développement touristiques.
Cependant, ce
secteur a connu des périodes marquées par des soubresauts sporadiques, des
récessions, des crises et des instabilités politiques qui sont de véritables
nuisance à son environnement. Des éléments qui constituent également le cadre
d’analyse objectif des investisseurs étrangers. Ce qui traduit l’instabilité
n’inspire pas confiance et la politique ne devrait pas servir d’entrave au
développement de ce secteur.
Car, les
stabilités politique et économique constituent les matières premières
essentielles à la croissance des déplacements touristiques
De surcroît, la
stabilité politique est généralement associée à la légitimité du pouvoir des
gouvernements ( Lemco, 1991 ; Weber, 1995) marquée par des foyers d’instabilité
politique et économique.
Certaines
destinations profitent de l’instabilité et de l’insécurité associées à d’autres
destinations.
Ainsi, l’image d’une
destination – qui découle de représentations et d’interprétations subjectives –
conduit-elle à créer des impressions de stabilité ou d’instabilité très fragiles
et facilement interchangeables.
Le tourisme a donc
grandement besoin d’une stabilité qui résulterait d’une perception dont les
médias sont les principaux vecteurs. La perception du risque dépend donc en
grande partie de la couverture médiatique d’un évènement ou d’un phénomène se
produisant dans un pays donné (le cas du Mexique en 2014). D’où la question des institutions.
La Thaïlande
offre à ce titre un exemple intéressant également. Ce pays de l’Asie du Sud-Est
considéré comme un pays phare de cette région depuis moult années a fait
l’objet de changements fréquents bde gouvernements notamment par l’intervention
des militaires. Dans la mesure où ces changements se sont réalisés en apparence
sans heurts et sans violence, la perception de stabilité du régime a été
maintenue dans l’esprit des visiteurs de sorte que l’industrie du tourisme a
continué à croître ( Hall et O’Sullivan, 1996). Cette situation montre que les
représentations de la stabilité et de l’instabilité politiques constituent des
caractéristiques fondamentales d’une destination touristique, dont l’importance
dépasse souvent celle des attraits naturels et culturels.
Donc, Les
destinations et les activités touristiques sont vulnérables, elles sont
réactives a toute perturbation de leur système et de leur cadre de
fonctionnement et la capacité des territoires à attirer les touristes est
évidemment impactée par l’instabilité politique.
D’autre part,
L’insécurité est l’un des facteurs de recul du tourisme mondial. Car les
touristes sont sensibles au risque sécuritaire. Depuis un certain temps, la
violence et la criminalité sont des caractéristiques très préoccupantes en
Amérique latine.
Au niveau de la
Caraïbe, malgré une diminution des homicides qui avoisine les 35% en
2009 et 2012, la
Jamaïque détient toujours un des taux les plus élevés des Amériques. Le nombre d’homicides
enregistrés entre janvier et juin a augmenté de 19% par rapport à celui relevé
au cours du même période en 2016, selon les statistiques de la Police.
En janvier et
mars, la commission d’enquête indépendante (INDECOM), mécanisme de surveillance
de la police, a reçu 73 nouvelles plaintes pour des agressions et recense 42 homicides
commis par des responsables de l’application des lois. Pendant l’année, 168
personnes ont été tuées par les forces de l’ordre, contre 111 en 2016.
La Jamaïque, qui
compte quelque 2,7 millions d’habitants, à l’un des taux de criminalité les
plus élevés au monde avec 43 meurtres pour 100.000 habitants en 2015. Elle a
déclaré l’état d’urgence dans la seconde ville de l’ile Montego Bay, une cite
touristique de 200.000 habitants ou 335 meurtres ont été commis en 2017, ce qui
a poussé les Etats-Unis, le Canada et le Royaume-Uni à mettre en garde leurs
ressortissants.
En début d’année
2018, les autorités touristiques locales jamaïcaines ont en leur lot d’inquiétudes
face aux problèmes de sécurités qui ont eu lieu dans la paroisse de St. James.
Malgré cela, La
Jamaïque reste une des destinations les plus connues des Caraïbes. Ce pays a vu
son affluence touristique augmenter de 5,4% pour le premier trimestre de 2018.
Dans l’ensemble, le nombre de voyageurs en escale a augmenté de 5,9% et les croisières
de 4,8% par rapport à la même période l’an dernier correspondant respectivement
à 1,25 million et à 1 million d’arrivée. Une augmentation d’une année à l’autre
de plus de 100 000 visiteurs.
En effet, les
initiatives de plusieurs agences de développement telles que le PNUD, le FMI
ayant contribué à la mise en place du DSRP ( Document stratégique de réduction
de la pauvreté) dans pas mal de pays
pauvres ont également porté sur le progrès touristique comme facteur pouvant
entraîner la croissance des pays en développement compte tenu de la
disponibilité d’une main d’œuvre à bon marché inemployée, de services à faibles
coûts de cadre naturels et culturels.
Par son poids
économique et les recettes qu’il génère, ce secteur représente une opportunité
pour les PMA qui, avec le tourisme de masse, pourraient devenir des
destinations prisées.
Tout compte fait,
malgré certains défis liés aux instabilités politiques, à la faiblesse
institutionnelle, Haïti représente un vivier en matière de potentialités
touristiques. Le pays reste une destination très courtisée notamment dans la
région caribéenne.
Toutefois, dans
le contexte actuel, il importe de :
Dynamiser
l’écosystème touristique Haïtien en promouvant des idées innovantes adaptées à
la réalité du XXIème siècle.
Repositionner
Haïti comme destination touristique dans la région en capitalisant sur les
acquis des dernières années
Répondre enfin
aux principaux défis dudit secteur touristique dont l’instabilité constitue
l’un des plus majeurs
De fait, La quête
du développement en Haïti, moyennant le tourisme, ne peut compter que sur des interventions
publiques urgentes en partenariat des autres acteurs concernés et une
participation intégrée de la population dans le secteur permettant de redéfinir
les priorités d’Haïti en matière touristique durable.
En définitive, les stratégies pour juguler l’instabilité politique et empêcher que le tourisme broie du noir en Haïti passent ,entre autres , par l’établissement et la mise en oeuvre de véritables politiques publiques visant l’amélioration des cadres et des conditions de vies de la population.
Auteur : Obed Blacker DORVILUS, étudiant finissant en Économie quantitative appliquée option planification au CTPEA