Tag: Production Nationale

  • CCIMH : le pivot stratégique d’Haïti dans un contexte de crise avec la République dominicaine

    Dans une annonce charnière du 20 novembre 2023, Jean Claude Verdier, ingénieur du son et homme d’affaires de renom, a révélé la création de la Chambre de Commerce et d’Industrie Mexique-Haïti (CCIMH). Cette initiative se déroule dans le contexte de relations commerciales tendues entre Haïti et la République dominicaine, un partenaire commercial important. La République dominicaine est le plus grand partenaire commercial d’Haïti après les États-Unis, avec un commerce bilatéral évalué à plus d’un milliard de dollars, dominé par les importations d’Haïti.

    Le déséquilibre commercial, dans lequel Haïti achète principalement des biens plutôt que de les vendre, souligne la nécessité de diversifier son approvisionnement en produits essentiels. Ce défi devient vite manifeste avec l’arrêt récent des importations en provenance de la République dominicaine. Suite à la décision unilatérale du président dominicain Luis Abinader de fermer les frontières en réponse à la reprise de la construction du canal sur la rivière Massacre, le commerce entre les deux nations a été perturbé. La fermeture a suscité des inquiétudes quant à la pénurie de biens, notamment de matériaux de construction, de produits pharmaceutiques et de produits alimentaires traditionnellement acquis en République dominicaine.

    Au milieu de cette crise commerciale, la nouvelle Chambre de commerce et d’industrie Mexique-Haïti vise à forger une relation commerciale solide entre Haïti et le Mexique. En élargissant ses liens avec le Mexique, la chambre cherche à combler le vide laissé par l’interruption du commerce dominicain et à établir une chaîne d’approvisionnement résiliente. Notamment, les premières expéditions résultant de la création de la chambre devraient arriver au Cap-Haïtien d’ici quelques semaines, répondant aux préoccupations de pénurie de la région.

    Jean Claude Verdier, président de la CCIMH, a également révélé des projets d’installations pétrolières stratégiques à travers Haïti, notamment dans le Nord, l’Artibonite et le Sud. Cette décision vise à décentraliser la réception des expéditions pétrolières actuellement concentrées à Port-au-Prince, une zone marquée par des défis sécuritaires. L’initiative s’inscrit dans le cadre des efforts visant à garantir un approvisionnement constant et sécurisé de cette ressource vitale dans tout le pays.

    L’expansion des relations commerciales avec le Mexique n’est pas un développement récent. Sous l’administration Lamothe en 2014, des hommes d’affaires haïtiens, en collaboration avec le ministère du Commerce et de l’Industrie, les ambassades du Mexique et d’Haïti, Pro Mexico et le Conseil entrepreneurial mexicain pour le commerce extérieur et l’investissement, ont orchestré une mission commerciale au Mexique. Les principaux objectifs de la mission étaient d’établir des partenariats, de familiariser les entreprises haïtiennes avec le marché mexicain et de renforcer les liens entre les deux nations.

    Malgré une croissance initiale, les efforts visant à renforcer les liens commerciaux avec le Mexique, où Haïti a un excédent commercial, ont finalement échoué, comme en témoigne le déclin des échanges commerciaux entre les deux pays. Entre 2001 et 2012, les échanges commerciaux entre les deux pays ont bondi de 600 %, dépassant les 60 millions de dollars. En 2013, le commerce bilatéral a atteint 81 millions de dollars, soit une augmentation de 31 % par rapport à l’année précédente. Néanmoins, le commerce bilatéral est tombé à environ 63,5 millions de dollars deux décennies plus tard.

    Selon la base de données COMTRADE des Nations Unies sur le commerce international, en 2022, les exportations du Mexique vers Haïti se sont élevées à 21,9 millions de dollars, tandis que les exportations d’Haïti vers le Mexique ont totalisé environ 41,6 millions de dollars, ce qui a permis à Haïti de détenir un excédent commercial important avec le Mexique. Historiquement, les principales exportations mexicaines vers Haïti comprennent les médicaments emballés, les farines et palettes de céréales ainsi que la poudre abrasive. En échange, Haïti exporte des T-shirts, des pulls et des huiles essentielles au Mexique.

    Contrairement au commerce bilatéral avec le Mexique, le commerce avec la République dominicaine a augmenté au cours des dernières décennies, Haïti étant le principal acheteur. Profitant de sa proximité avec Haïti et en collaborant avec ses élites économiques et politiques, la République dominicaine a rapidement développé ses exportations vers Haïti. Parallèlement, le déficit commercial d’Haïti avec la République dominicaine s’est considérablement accru au cours des deux dernières décennies, car Haïti continue d’acheter des biens qu’il pourrait produire localement, mais manque de la volonté politique nécessaire.

    Qu’ils soient motivés par des décisions volontaires ou poussés par la communauté internationale, les choix politiques et économiques d’Haïti ont contribué de manière significative à l’état actuel du pays. Dans les années 1960, la République dominicaine et Haïti partageaient un PIB réel par habitant similaire. Cependant, un écart important s’est produit au fil des années. Cet écart peut être attribué aux instabilités politiques et macroéconomiques, à l’insuffisance des investissements dans les infrastructures et le capital humain, ainsi qu’à la détérioration de l’environnement, qui entravent la croissance et la production locale d’Haïti.

    Au cours des dernières décennies, la République dominicaine et Haïti ont affiché des taux de croissance contrastés en Amérique latine et dans les Caraïbes. La République dominicaine a atteint l’un des taux de croissance du PIB réel les plus élevés de la région, tandis qu’Haïti a atteint le plus faible. Les décisions politiques depuis 1960 ont joué un rôle crucial, la République dominicaine ayant constamment surpassé Haïti grâce à des mesures structurelles et des politiques de stabilisation efficaces, notamment des progrès dans l’éducation, du crédit au secteur privé et une stabilité politique accrue.

    La République dominicaine a connu des tendances de croissance positives grâce à une productivité accrue et à l’accumulation de capital. En revanche, Haïti a connu de mauvaises performances économiques avec une productivité totale des facteurs négative pendant cinq décennies. Cette divergence a conduit la République dominicaine à devenir autosuffisante en matière de production alimentaire et à exporter ses excédents vers le marché haïtien, créant ainsi une dépendance à l’égard des produits dominicains.

    Près de 25 % des importations d’Haïti proviennent de la République dominicaine, passant de 208 millions de dollars en 2002 à 1,02 milliard de dollars en 2022. En revanche, les importations de la République dominicaine en provenance d’Haïti n’étaient que de 11,92 millions de dollars américains cette année-là.

    L’annonce de la Chambre de Commerce et d’Industrie Mexique-Haïti, dirigée par Jean Claude Verdier, arrive à un moment crucial dans les relations commerciales tendues entre Haïti et son principal partenaire commercial, la République dominicaine. Le déséquilibre du commerce bilatéral, où Haïti effectue principalement les achats, a incité de nombreuses personnes à remettre en question la politique économique du pays et ses relations avec la République dominicaine.

    La perturbation de l’approvisionnement en marchandises en provenance de la République dominicaine, résultant de la fermeture des frontières initiée par le président Luis Abinader, souligne l’urgence de diversifier les canaux d’approvisionnement. Malgré la pénurie potentielle causée par la crise, la nouvelle chambre vise à y remédier en facilitant l’arrivée des cargaisons au Cap-Haïtien. La création de la chambre reflète une approche proactive visant à renforcer la résilience économique d’Haïti et à favoriser de nouveaux partenariats dans un paysage commercial régional en évolution.

    La diversification des canaux d’approvisionnement est essentielle pour renforcer la résilience économique d’Haïti, mais l’objectif ultime devrait être la production locale. La priorité première de la population haïtienne devrait être de lutter pour la souveraineté alimentaire le plus rapidement possible. Malgré la soumission historique de l’État aux intérêts privés et internationaux, les gens ne devraient exiger rien de moins que la souveraineté alimentaire. Ce concept souligne le droit des individus, des communautés et des nations à façonner leurs propres systèmes alimentaires et agricoles. La construction du canal de la rivière Massacre et toute l’énergie positive qu’elle apporte devraient servir de catalyseur pour tracer la nouvelle voie du pays vers la sécurité alimentaire et le développement économique.

  • L’Inde interdit les exportations de riz : pourquoi Haïti devrait s’inquiéter

    Le 20 juillet, l’Inde a interdit les exportations de riz blanc non-basmati dans le but de calmer la hausse des prix intérieurs, suscitant des inquiétudes quant à une éventuelle crise alimentaire mondiale. Cela a été suivi par des reportages et des vidéos d’achats de panique et d’étagères de riz vides dans des épiceries indiennes aux États-Unis et au Canada, faisant grimper les prix dans le processus.

    L’interdiction des exportations de riz de l’Inde pourrait être une source de préoccupation pour Haïti en raison de sa forte dépendance à l’égard des importations de riz. L’Inde étant un important fournisseur de riz dans le monde, l’interdiction pourrait entraîner des perturbations potentielles de la disponibilité du riz et pourrait avoir un impact sur la sécurité alimentaire dans le pays.

    Les variétés de riz blanc non-basmati sont couramment utilisées pour la cuisine de tous les jours et sont largement consommées dans le monde entier, ce qui fait des conséquences de l’interdiction une source de préoccupation sur le marché international du riz.

    En tant que premier exportateur mondial de riz, représentant environ 40 % du commerce mondial, l’interdiction a perturbé l’approvisionnement en riz des principaux acheteurs comme la Chine, les Philippines et le Nigeria. Étant donné que ces pays devront rechercher des sources alternatives pour leur approvisionnement en riz, l’impact de l’interdiction pourrait être important et de grande envergure.

    Haïti, qui consomme majoritairement du riz américain, ne sera pas épargné si l’interdiction se prolonge trop longtemps. Les effets d’entraînement de la flambée des prix finira par atteindre le pays où une partie importante de la population est en situation d’insécurité alimentaire.

    L’interdiction d’exportation intervient à un moment où les prix mondiaux du riz augmentent et où les approvisionnements sont tendus en raison des intempéries et de l’augmentation des coûts de production. L’interdiction a également été motivée par les préoccupations nationales concernant l’inflation alimentaire et la pression politique avant les prochaines élections en Inde.

    Les experts craignent que l’interdiction n’augmente considérablement les prix mondiaux du riz, affectant les populations vulnérables qui dépendent fortement du riz comme aliment de base. En Haïti, le riz est un élément crucial du régime alimentaire haïtien, fournissant une part importante de l’apport calorique quotidien.

    Selon l’économiste en chef du FMI, Pierre-Olivier Gourinchas, l’interdiction des exportations de riz blanc non-basmati de l’Inde fera probablement grimper les prix, entraînant une augmentation potentielle pouvant atteindre 15 % des prix mondiaux des céréales cette année.

    Alors que des interdictions d’exportation de produits alimentaires ont également été observées dans d’autres pays, l’interdiction de l’Inde est considérée comme particulièrement risquée, car elle pourrait créer une instabilité sur le marché mondial du riz.

  • L’État utilise des gangs armés pour chasser les paysans de leurs terres

    Plusieurs groupes d’agriculteurs et organisations dénoncent les violents accaparements de terres en cours dans le nord et le nord-est d’Haïti. Les autorités étatiques soutenues par la communauté internationale et le secteur privé utilisent de plus en plus des gangs armés pour terroriser les gens afin d’obtenir ce qu’ils veulent.

    Les dernières victimes sont des agriculteurs des régions du pays où le sol est le plus fertile et riche en minéraux souterrains, notamment Papaye (Plateau central), Saint-Michel de l’Attalaye, Piatre/Montrouis (Artibonite), Limonade (Nord), Prévoyance et Pitobert (Nord-Est).

    Depuis des années, l’État haïtien met en œuvre des politiques favorisant quelques familles influentes du secteur privé, des politiciens corrompus et des étrangers au détriment du peuple. Ces politiques ont déplacé les paysans de leurs terres et détruit la production alimentaire locale et les industries domestiques.

    Les autorités de l’administration d’Ariel utilisent des bandes armées pour chasser les familles paysannes, puis s’emparent de leurs terres. Pendant ce temps, Haïti, qui était autrefois autosuffisant en cultivant sa propre nourriture, dépend de plus en plus des importations et de l’aide étrangère pour survivre. Aujourd’hui, près de la moitié de la population est confrontée à la faim.

    Déclaration conjointe des organisations paysannes et civiles sur cette question.

  • Destruction de la production agricole et la montée des gangs en Haïti

    Il existe un lien direct entre la destruction de la production agricole du pays et l’augmentation de l’activité des gangs en Haïti. Outre des facteurs exogènes tels que la politique étrangère d’autres pays et l’influence d’organisations internationales qui ne sont pas favorables à Haïti, combinés à des facteurs politiques et des intérêts économiques locaux, l’un des principaux facteurs qui contribuent à la violence que nous vivons aujourd’hui en Haïti est la destruction du plus grand moteur économique du pays, qui est l’agriculture.

    L’exode massif des communautés rurales

    Dans les années 70 et 80, environ 80 % de la population était considérée comme rurale et dépendait principalement de l’agriculture. Le mauvais traitement du secteur a poussé la plupart de ces personnes vers les villes pour une vie meilleure. L’exode massif des communautés rurales a touché toutes les grandes villes. Cependant, la capitale, Port-au-Prince, où les gangs sont plus actifs a été le plus touchée. En 1980, la population de la ville était de 700 592 habitants. Selon les données des Données des Nations Unies, la population de Port-au-Prince en 2023 est estimée à 2 987 455, soit un quart de la population du pays.

    Alors que l’exode rural s’accélère, le gouvernement n’a pas réussi à gérer l’urbanisation rapide des villes. En conséquence, 74 % de la population urbaine d’Haïti vit dans des bidonvilles sans système d’égouts ni réseau électrique. Il n’a pas fourni les services essentiels à la création d’emplois ou à des conditions de vie décentes. La sécurité a été particulièrement négligée avec un ratio police/population insuffisant. D’autre part, la myopie du gouvernement associée à de mauvaises politiques a décimé la production agricole locale tout en favorisant les importations au profit de quelques-uns. Pendant ce temps, d’autres secteurs n’ont pas créé suffisamment de nouveaux emplois pour absorber les nouveaux arrivants dans les villes.

    La précarité dans le bidonville facilite le recrutement des jeunes dans les gangs

    Une grande partie de la population se retrouve dans une telle situation de précarité qui rend la jeunesse des quartiers populaires particulièrement vulnérable au recrutement des gangs et à leur utilisation par les acteurs politiques et économiques dans des activités douteuses. Maintenant, ces gangs sont déchaînés et le gouvernement les regarde passivement alors qu’ils terrorisent la population. L’élite économique ayant la mainmise sur l’État haïtien plutôt que de faire pression sur le gouvernement pour faire respecter l’État de droit et sécuriser les quartiers où elle opère, elle recrute et établit une relation avec des gangs pour sécuriser leurs affaires et tenir leurs concurrents à distance.

    L’élite économique parvient à contrôler tous les aspects du gouvernement et de son institution. Une telle capture les a mis dans le siège du conducteur. Ils ont leur influence sur les politiques économiques du pays, les réglementations, les lois votées par le parlement et les contrats gouvernementaux. Elle contrôle également les médias et la société civile, qu’elle utilise pour faire avancer ses intérêts. En outre, ils utilisent leurs relations avec les diplomates et les organisations internationales pour garder une emprise ferme sur l’infrastructure économique du pays.

    Adoption de politiques néolibérales au détriment de la production agricole locale

    Entre 1986 et 1995, Haïti a adopté une série de politiques néolibérales qui ont détruit la production agricole locale tout en privatisant les entreprises les plus importantes de l’État en matière de revenus, détruisant des dizaines de milliers d’emplois. Le gouvernement a supprimé toutes les protections pour le secteur agricole local, non préparé à faire face à la concurrence de l’agro-industrie américaine. Ainsi, Haïti, qui naguère était autosuffisant en nourriture, importe maintenant la plupart des aliments dont il a besoin. Les importations alimentaires sont actuellement entre les mains d’un petit groupe d’importateurs politiquement influents et bien connectés au niveau international.

    L’effet dévastateur de ces politiques a accéléré la migration vers les villes, en particulier dans les bidonvilles de Port-au-Prince, où les gens sont désespérés et vulnérables au recrutement de gangs alors que la population est exposée à l’insécurité alimentaire et que les prix des denrées alimentaires montent en flèche sur le marché mondial. En raison de la décimation du secteur agricole local, près de la moitié de la population peine à se nourrir. La plupart d’entre eux vivent dans des bidonvilles, où beaucoup trouvent plus facile de rejoindre un gang pour gagner de l’argent que d’aller à l’école ou de trouver un emploi.

  • Désharmonisation entre le secteur bancaire et le secteur réel en Haïti: quand la finance boude la production

    « Les banques sont les meilleurs moteurs jamais inventés pour stimuler la croissance économique » Alexander Hamilton (1781).

    La littérature sur la relation existant entre la finance et la croissance de la production de biens et services est légion. Ross Levine, en 2005, a publié une étude classique (Finance and Growth: Theory, Evidence, and Mechanisms) qui compte près de 300 références ; plus de 100 documents ont été rédigés après 2005. La plupart de ces recherches, de Walter Bagehot (1873) à Marco Pagano (2013), ont abouti à la conclusion que le développement financier (mesuré, entre autres, par le ratio crédit privé/ produit intérieur brut) est une condition sine qua non au développement économique. Notamment, au travers de son impact sur l’investissement, l’innovation technologique, la productivité des facteurs de production et donc, sur la croissance économique.

    Levine (1997) définit la fonction essentiellement d’un système financier comme la facilitation de l’allocation des ressources à travers le temps et l’espace. Pour John Maynard Keynes, la monnaie est indissociable de la production marchande ; ce sont les deux éléments constitutifs du fonctionnement de l’économie. La monnaie est créée à partir du financement de l’activité économique. Tandis que, du côté des classiques, c’est la dichotomie. Selon David Ricardo, la monnaie ne participe pas à la formation de l’équilibre économique ; elle ne détermine que le niveau absolu des prix. Ce dernier est déterminé indépendamment de l’échange réel par la quantité de monnaie en circulation.

    Après cette entrée en matière, on peut se demander comment la situation se présente-t-elle en Haïti.

    L’économie haïtienne est caractérisée par cette dichotomie dont parlent les classiques dans la mesure où on observe ce que la Banque de la République d’Haïti (BRH) désigne comme la « non-intégration des sphères financières et réelles ». D’un côté, nous avons un système bancaire considéré comme performant, sain et solide. Alors que, de l’autre côté, le secteur réel est enfermé dans une trappe à faible croissance. Pour Edouard Francisque (PhD), ce secteur souffre de « nanisme économique ». La non-intégration du secteur bancaire dans le tissu de production a été dénoncée par Marc Louis Bazin (Le Nouvelliste, 2008) :

                Le secteur bancaire ne finance pas le développement. Pratiquement 50 % des prêts des banques commerciales vont au commerce et à la consommation. Les prêts à l’investissement productif, à l’agriculture et aux transports ne représentent que 10 % du total des prêts que consent le secteur bancaire. La part du crédit qu’accordent les banques est la plus faible de la Caraïbe (11 %). 

    En effet, à partir des données de la BRH, on constate que, de 1994 à 2019, le volume des actifs du secteur bancaire haïtien, composés de bons BRH et autres placements, des immobilisations, des disponibilités et du portefeuille de crédit net, n’a cessé de croître pour atteindre 401.95 milliards de gourdes en 2019 ; avec une croissance moyenne annuelle de 17.03 %. Il est à noter que la variation à la hausse du taux de change augmente la valeur nominale des actifs libellés en dollars lorsque ces derniers sont convertis en gourdes. Les dépôts captés auprès des clients ont atteint une valeur d’environ de 324.5 milliards de gourdes et ils ont augmenté à un taux de croissance moyen, sur la période, de 17.43 %. Les dépôts à vue, les dépôts d’épargne et les dépôts à terme croissent en moyenne au rythme de, respectivement, 19.3 %, 14.2 % et 18 %. Cependant en termes d’intermédiation, l’activité des banques ne s’est pas intensifiée. Le ratio des prêts nets accordés par les banques sur les dépôts recueillis est en moyenne de 39.48 % sur cette période. Il est passé de 53.2 % en 1997 à 38.4 % en 2019.

    En ce qui a trait au poids de certains secteurs dans la répartition du crédit total accordé par le secteur bancaire haïtien, on constate que, de 2000 à 2019, dans le souci de réduire les risques liés à l’octroi de crédit, le secteur agricole (agriculture, sylviculture et pêche), l’industrie alimentaire et l’hôtellerie ont reçu respectivement 0.31 %, 4 % et 1.98 % de l’enveloppe des prêts bancaires. Alors que, les activités de commerce de gros et de commerce de détail dominent la distribution du crédit en recevant respectivement 14.84 % et 13.81 % sur la même période. Les crédits à la consommation représentent 10.74 % de l’ensemble des crédits accordés au cours de ces vingt années.

    De 1994 à 2019, on voit que les revenus et les bénéfices nets des banques ont une tendance haussière sur toute la période, mais elle a été interrompue par les fortes turbulences politiques au cours de l’année 2018. Cependant, on remarque que les autres revenus croissent plus vite que les revenus d’intermédiation. Les autres revenus, comme les gains de changes et les commissions, ont dépassé les revenus d’intermédiation à partir de 2010. Les revenus nets d’intérêt ont un taux de croissance moyen de 18.22 % alors que les autres revenus augmentent à un rythme de 19.89 %. En effet, ces dernières années, les banques utilisent plus de ressources pour la réalisation des opérations de change (achat et vente de devises).

    Qu’en est-il du secteur réel ?

    Le rachitisme de l’économie haïtienne peut être observé à travers l’évolution de son produit intérieur brut (PIB réel), exprimé en milliards de gourdes réelles, ou encore son taux de croissance. Les seules années où le pays a dégagé un taux de croissance économique de plus de 5 % sont 1995 et 2011, respectivement, 9.9 % et 5.5 %. Deux années de reprise économique qui ont succédé les chocs du début des années 90 et de 2010. De 1990 à 2019, le taux moyen de croissance économique est de 0.88 % alors que la taille de la population a crû au rythme de 1.6 % sur la période. Ce qui implique que le taux de croissance de l’économie haïtienne ne suffit pas à améliorer significativement le niveau de vie de la population mesuré par le revenu national brut par habitant, qui est, en moyenne, de 734 dollars US constants. En plus, le taux de chômage, en pourcentage de la population totale, est de 11.63 % sur la période. 

    De nos jours, le concept de pays en voie de développement est plus utilisé que celui de pays sous- développé. Mais, selon l’économiste Frtiz Jean Jacques, Haïti ne mérite pas l’appellation de pays en développement, car nous sommes trop loin derrière. Pour lui : « Une économie sous-développée est reconnaissable par l’importance de son PIB, mais beaucoup plus évidemment par ces caractéristiques réelles » (Jean Jacques, 2015). Nous avons un PIB moyen, en dollars US constants de 2010, de l’ordre de 6.67 milliards de 1990 à 2019 et un PIB par habitant de 756 dollars en 2019. Haïti est le pays le plus pauvre de l’hémisphère occidental avec un indice de développement humain le classant 169e sur 189 pays en 2019. De plus, l’industrie ne compte pas assez dans la formation du produit intérieur brut. 

    À partir des données en séries temporelles allant de 1990 à 2019, en utilisant des outils statistiques et économétriques, on constate que le coefficient de corrélation simple (qui mesure le degré de liaison entre deux variables) entre les crédits accordés au secteur privé et le taux de croissance du PIB réel est faiblement significatif d’un point de vue économique alors que la corrélation entre les crédits bancaires et le taux d’investissement est statistiquement nulle.

    À l’aide d’un modèle de régression multiple, on trouve qu’une variation positive de 1 % des crédits privés accordés par les banques commerciales haïtiennes, en pourcentage du PIB, fait augmenter le taux de croissance de la production réelle de 10.67 %. En regard au seuil de significativité, on peut dire que l’effet des crédits sur le taux de croissance de l’économie est faiblement considérable. En effet, une hausse de 0.01 des crédits au secteur privé augmente ce taux de croissance de seulement de 0.1 point de pourcentage. Tandis que l’utilisation d’un modèle vectoriel autorégressif, afin de tenir compte du biais de simultanéité, montre que les crédits accordés aux entrepreneurs et consommateurs privés, pour la période étudiée, ne prédisent pas une évolution positive du taux de croissance réel de l’économie haïtienne (pour plus de détails, consultez le lien suivant : https://academia.edu/resource/work/81927243).

    Comment expliquer cette désharmonisation ?

    Plusieurs facteurs peuvent expliquer la non-intégration du système bancaire haïtien dans le tissu de production. Ici, on va tenir de deux facteurs jugés déterminants dans la désintermédiation financière : l’incertitude découlant de l’instabilité chronique en Haïti et le faible revenu moyen des ménages.

    L’incertitude constitue un poison virulent, non seulement pour l’activité économique, mais aussi pour l’activité financière. En effet, lorsque les banques sont pessimistes, elles sont plus réticentes à accorder du crédit et elles endurcissent leurs exigences. Par conséquent, l’accès aux ressources monétaires permettant le financement des investissements devient plus cher donc, plus difficile. L’instabilité chronique en Haïti et l’absence de modernisation du secteur agricole, qui est soumis aux alinéas climatiques (cyclone, sécheresse) sont sources d’incertitude. L’activité productive se déroule dans un environnement caractérisé par l’insécurité, l’instabilité politique, une vulnérabilité face aux catastrophes naturelles et une mauvaise organisation territoriale. Alors, les banques commerciales préfèrent s’orienter vers des activés offrant certaines garanties telles que les opérations de change (achat et vente de devises), l’achat d’obligations et de bons du trésor et les activités commerciales au détriment du financement de la production de biens et services.

    Les banques, en tant qu’entreprises, ont pour objectif principal d’accroître les avoirs des actionnaires en rémunérant leurs capitaux à un taux plus élevé que le coût d’opportunité de ces derniers (Lhermite, 2003), en gérant et en se servant de l’argent des autres. Elles sont donc tenues d’être prudentes et vigilantes quant à l’utilisation des fonds recueillis. Alors, elles cherchent à réduire les risques en finançant, de préférence, les opérations commerciales qui consistent à importer et revendre des biens indispensables à la consommation. Ce qui explique, en partie, que, les activités de commerce de gros et de commerce de détail dominent la distribution du crédit.

    Selon Jesùs Huerta De Soto (Monnaie, banque, crédit bancaire et cycles économiques, 2011), pour accorder des crédits sains (c’est-à-dire moins risqués, ne générant pas l’accroissement démesuré de la masse monétaire), les banques commerciales ont besoin de constituer des réserves correspondantes garanties par les dépôts bancaires.

    En Haïti, le faible niveau du revenu moyen des ménages résultant, entre autres, d’une activité économique en détresse, d’une faible productivité, face à une forte pression de la population consommatrice, inhibe la formation d’une épargne destinée au financement des biens d’investissement (facteur de production). La faiblesse de l’épargne est l’une des causes  fondamentales de la stagnation économique. Les ménages, ne disposant pas assez de revenus, sont obligés de consommer immédiatement leurs ressources monétaires pour satisfaire leurs besoins. Les chiffres ci-dessus montrent que les dépôts à vue croissent plus vites que les dépôts d’épargne et les dépôts à terme. Ce qui peut contrarier l’octroi de crédit à long terme par les banques pour financer l’investissement. En effet, ces dernières accordent plutôt des crédits à court terme seulement à des commerçants ayant un chiffre d’affaires considérable et offrant des garanties très solides.

    Le Dr. Edouard Francisque a raison de dire que « l’absence de flux monétaires continus est un facteur de blocage structurel de l’économie d’Haïti où coexistent deux secteurs juxtaposés mais non intégrés ». Suite à ce constat, il est pertinent de faire quelques suggestions. Ainsi, on recommande :

    • À l’État haïtien de jouer son rôle en travaillant à l’établissement d’un environnement favorable à l’investissement. Notamment, en réduisant les incertitudes liées à l’évolution de l’activité économique et en réaménageant le territoire.
    • Au Bureau d’Information sur le Crédit (BIC) et au Centre de Facilitation des Investissements (CFI) de travailler conjointement afin de jouer un rôle plus significatif dans la rencontre des entrepreneurs ayant des projets générateurs de croissance économique et des agents à capacité de financement qui désirent investir.
    • À la Banque de la République d’Haïti de revoir ses programmes d’incitation afin de stimuler davantage les banques commerciales à attribuer plus de ressources à l’octroi de crédits que les autres activités de non-intermédiation.
    • Aux autorités économiques et financières de travailler à la création d’une banque de développement afin de combattre l’exclusion financière en octroyant des crédits accompagnés (suivi et contrôle) aux investisseurs avec des projets rentables financièrement et économiquement.

    Rédigé par Roobens CANGÉ

    Économiste

    Email : roobenscange@gmail.com

    Références Bibliographiques

    FRANCISQUE Edouard, 2014. La Structure Économique et Sociale d’Haïti, un Essai d’Interprétation, C3 Editions, Pétion-Ville, 328 p.

    JEAN JACQUES Fritz, 2015. L’Économie Haïtienne, État et Stratégie de Développement, Editions Oracle, Montréal (Québec), 267 p.

    KEYNES John Maynard, 1936. General Theory of employment, Interest and Money; trad. fr. DE LARGENTAYE Jean, 2017. Théorie Générale de l’Emploi, de l’Intérêt et de la Monnaie, Ed. Payot & Rivages, Paris, 489 p.

    LEVINE Ross, 1997. Financial Development and Economic Growth: Views and Agenda, [Journal of Economic Literature, Juin, Vol. 35, p. 688 à 726.

    LEVINE Ross, 2005. Finance and Growth: Theory, Evidence, and Mechanisms, in [Handbook of Economic Growth, Elsevier B.V., ed. by Phillipe Aghion and Steven N. Durlaf, p. 865 à 934.

    LHERMITE François, 2003. Performance et Situation  des Banques dans l’Economie Haïtienne, L’accès, 1ere éd., 364 p.

    PANIZZA Ugo, 2014. Développement Financier et Croissance Economique : les Connus Connus, les  Inconnus Connus et les Inconnus Inconnus, De Boeck Supérieur, Février, Vol. 22, p. 33 à 66.

    Sources de données

    Banque de la République d’Haïti (BRH)

    Banque Mondiale.

  • Haïti – Taïwan : 2 millions de dollars pour l’augmentation de la production de semences de riz

    Une cérémonie de signature d’échange de notes relative à un projet de production de semences de riz entre les Gouvernements taïwanais et haïtien a eu lieu le vendredi 18 juin 2021, entre Son Excellence M. Patrix SEVER, Ministre de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural (MARNDR), et Son Excellence M. Wen Jiannn Ku, Ambassadeur de Chine (Taïwan) en Haïti.

    Dans le cadre du projet REPONSE, le gouvernement de la République de Chine (Taïwan) fournira au gouvernement d’Haïti plus de 2 millions de dollars pour soutenir son agriculture.

    Selon l’attestation de versement de contribution, la République de Chine (Taïwan), dans le cadre de la coopération bilatérale avec la République d’Haïti, fruit d’une longue amitié et d’une étroite collaboration, renouvelle son soutien au secteur agricole haïtien.

    Le gouvernement taïwanais apporte une nouvelle tranche de financement au projet « Renforcement de la production nationale de semences de riz (REPONSE) » mis en œuvre dans les régions du Sud, de l’Artibonite, du Nord et du Nord-Est.

    REPONSE a débuté en 2014 avec la mission de renforcer l’ODVA dans son travail de production de semences de riz de qualité. Le gouvernement taïwanais finance ce projet via le Fonds de coopération et de développement international (ICDF).

    Aujourd’hui, Haïti importe plus de 80% de ses besoins en riz annuellement. Le REPONSE visait à augmenter la production de semences de riz de 600 à 2000 tonnes et visait à l’augmenter de 45% par rapport aux besoins des riziculteurs.

    Le Ministre de l’Agriculture, des Ressources Naturelles et du Développement Rural, Son Excellence M. Patrix SEVER, a accepté la contribution et a exprimé sa gratitude à Taiwan. M. SEVER exprime également l’engagement du gouvernement haïtien à renouveler son intérêt à renforcer les relations de coopération et d’amitié entre les deux pays.

    Ayant des relations diplomatiques avec seulement 17 pays (Au 22 avril 2020), Taiwan accueille l’alliance d’Haïti. Après que le pays voisin a changé les relations diplomatiques de Taïwan à la Chine, Haïti réaffirme ses liens de 65 ans avec Taïwan.

    Haïti reçoit des aides depuis longtemps mais en termes de résultats et de performances, elles n’ont pas encore porté leurs fruits.

  • “ Le pire est à venir ! Et si l’on relance la production nationale ? ”

    La production nationale avait connu une protection jusqu’au début des années 1980 par des barrières douanières particulièrement élevées sur certains produits stratégiques. Le gouvernement subventionnait également quelques produits de première nécessité à l’époque, ce qui permettait de proposer à la vente à moindre coût, et donc aux personnes pauvres d’y accéder plus facilement.

    Ainsi, la production nationale parvenait à satisfaire la demande interne pour plusieurs produits agricoles, en particulier ceux qui étaient plus consommés, et le prix des matières courantes ou stratégiques était en partie contrôlable.

    À partir des années 1986-1987, dans le cadre d’un plan d’ajustement structurel, les autorités haïtiennes ont abaissé les barrières douanières, de sorte que le marché national a très vite été envahi par des produits étrangers hautement subventionnés, notamment en provenance des États-Unis.

    Ces mesures qui visent la libération du marché national affectent la production nationale. Car les produits alimentaires qui proviennent de l’étranger ont pu entrer dans le pays sans payer les taxes. Ce qui permet aux produits importés de vendre à un prix plus faible que les produits locaux.

    Voyons quelques handicaps !

    L’aide alimentaire, qui devrait être un véritable support pour l’agriculture haïtienne, représente un handicap pour le développement de l’agriculture haïtienne. Elle représente une source de découragement pour les paysans haïtiens. On constate, après la distribution de l’aide alimentaire dans le pays, une diminution des prix de certains produits agricoles haïtiens sur le marché local. Puis, la valeur de ces produits diminue et reste sur le marché parce que les gens ont d’autres produits alimentaires presque substituables à de meilleurs prix sur le marché. Du coup, le mépris de certains produits agricoles haïtiens engendre un dégoût chez les paysans et cela va diminuer automatiquement le rendement et la productivité des paysans.

    -Le manque d’investissement dans l’agriculture haïtienne représente également un problème majeur pour sa productivité – il n’y a pas de banques agricoles dans les milieux ruraux qui pourraient faciliter les crédits agricoles aux paysans haïtiens. Cela réduit la productivité des paysans haïtiens qui empêche à l’agriculture haïtienne de répondre aux besoins alimentaires de la population.

    De plus, les techniques, les outils et les pratiques qu’utilisent les paysans pour travailler la terre posent également des problèmes pour sa productivité. Ces outils (roue, machette, pioche, etc.) diminuent le rendement des paysans.

    Le déclin de l’agriculture s’accompagne de son lot de conséquences néfastes pour l’ensemble de la société haïtienne, et ceci, dans le contexte actuel où les prix des produits recommencent à augmenter ; d’où la nécessité d’une relance de la production nationale.

    D’aucuns pensent que la sauvegarde de l’économie ne passe que par les grandes plantations, mais c’est pas le cas ! Les petites relèves d’une grande importance également, surtout au moment où la population commence à ne pas pouvoir se nourrir.

    C’est là qu’interviennent les paysans !

    Relancer la production nationale certes, mais comment faire ?

    « Le meilleur expert ne pourra pas créer un grand impact si les conseils sont ignorés par le ministère de l’Agriculture haïtienne. » (Joseph Dejoie)

    La présence de l’État (son engagement) est importante dans le développement de l’agriculture haïtienne. Il doit encourager les paysans en appliquant un ensemble de mesures dans le but de contribuer à la satisfaction des besoins alimentaires de la population.

    1) En agriculture, il faut faire des choix. L’on ne peut pas tout produire vaguement. L’État devrait faire des choix rationnels pour savoir quel type de produit qui est prioritaire pour le pays. Ce, afin d’introduire des incitatifs et des encadrements spécifiques pour encourager la production dans la filière définie.

    2) L’État doit mettre en place des institutions qui accordent aux agriculteurs des crédits agricoles.

    3) L’État doit favoriser également le développement et la production de certains produits alimentaires importés actuellement. Il doit beaucoup plus intéresser à la production alimentaire consommée à l’intérieur du pays au lieu d’orienter l’agriculture vers l’extérieur – qui est une agriculture extravertie.

    4) D’autres en plus, l’État doit mettre en place des institutions qui doivent intervenir dans les conflits terriens et redistribuer les terres. La terre est le principal moyen de production pour les paysans. En fait, une bonne distribution des terres aux paysans sans y être contraint est le meilleur moyen pour relancer la production agricole.

    5) L’État doit supprimer tous les prélèvements abusifs qui empêchent les paysans à maximiser leur productivité. Une réduction des taxes sur les produits agricoles cultivés par les paysans haïtiens peut encourager vivement ces derniers à augmenter leur productivité.

    6) L’éducation des paysans haïtiens est un facteur qui peut aider à augmenter la production agricole. Cette formation peut donner aux paysans de nouvelles techniques agricoles et les aider à s’adapter aux effets de l’environnement.

    On doit les éduquer avant tout processus de financement louable, car le financement ne fera pas de miracles avec des terres non irriguées, de faibles niveaux de mécanisation et sans absence de formations techniques pour les paysans.

    Il faut agir, le pire est à venir !

    Don Waty BATHELMY, économiste, blogueur, rédacteur.

    donwatybathelmy@gmail.com
    donwatybathelmy257.blogspot.com

    WhatsApp : +5093155 8862

    Référence

    Pierre Jameson BEAUCEJOUR

  • The Rice Value Chain in Haiti: Production, consumption and imports

    According to recent figures, rice is the main food item imported by Haiti, and it is also the most important staple of the population’s diet. According to Haiti’s National Food Security Coordination Agency (CNSA), milled rice imports during 2010 reached 381,212 tons, while domestic milled rice production in 2011 was 77,551 tons. Total rice consumption in Haiti reaches a little less than 458,000 tons annually, with 83 percent imported, and just 17 percent produced domestically. As Table 5 indicates, Haiti’s import dependence shows a clear upward trend in recent years, owing to the stagnation of domestic production for more than two decades, with volumes of around 70,000 tons. It is clear that Haiti’s abrupt tariff reduction in the mid-1990s and its lack of public policies to support small-scale producers have contributed to this stagnation.

    Haïti – Total des réserves internationales

    Haitian rice imports, 2001–2010 (thousands of tons)

    y compris l’or aux prix courants En milliards de dollars (2005-2019)

    Source: Oxfam

    a. Includes commercial imports and food aid.


    Click here to download Oxfam’s proposed national policy for Haiti’s rice sector

  • L’effondrement de l’industrie du café haïtien

    Haïti, qui produisait autrefois la moitié du café mondial, aujourd’hui ne contribue qu’une fraction du commerce mondial. En 1990, le pays a exporté 190 000 sacs de 60 kg de café. En 2017, Haïti n’exportait que 2 000 sacs de 60 kg de café, soit une baisse de 98,95% par rapport aux exportations de 1990.

    Les exportations de café d’Haïti ont régulièrement diminué en raison d’une combinaison de facteurs externes et internes. Les facteurs les plus importants qui affectent la compétitivité d’Haïti sur le marché mondial sont les facteurs internes.

    Alors que de nombreux pays mettent en œuvre des politiques publiques de manière à soutenir leurs secteurs agricoles, le gouvernement haïtien n’intervient pas suffisamment pour soutenir le secteur agricole du pays, en particulier ses cultures commerciales telles que le café.

    En fait, la production de café haïtienne a souffert des politiques gouvernementales qui nuisent plutôt que de les aider. Par exemple, les taxes à l’exportation ont été un facteur majeur dans la réduction de la compétitivité du café haïtien sur le marché mondial.

    Alors que le gouvernement maintient des taxes sur les exportations, il a réduit les taxes sur les importations. Ces politiques n’affectent pas seulement la production de café, elles affectent l’ensemble de l’industrie agricole, en particulier la production de riz. De plus, il n’y a aucun effort pour mettre un terme à la déforestation et à l’érosion accélérée, qui sont des facteurs environnementaux clés pour les productions de café. Il y a aussi un manque de financement, en plus des bouleversements politiques qui ont perturbé tous les secteurs de l’industrie.

    La dégradation de l’environnement et le manque de soutien au fil du temps ont non seulement fait perdre à l’industrie le capital humain nécessaire à la croissance de l’industrie, mais l’industrie a perdu les compétences nécessaires pour cultiver, récolter et transformer le café.

    En outre, les techniques de culture primitives et les carences de fertilisation ont entraîné une forte incidence de parasites et maladies tels que le scolyte incontrôlable. Donc, la production exportable a été très faible par rapport à la production globale. Les exportateurs offrent des prix bas et la consommation de café locale a aussi augmenté.

    D’autres facteurs incluent la concurrence accrue de pays tels que le Vietnam, qui a augmenté ses exportations de 20 fois ; Le Pérou a quadruplé ses exportations de café et le Brésil ; le plus grand exportateur du monde a presque doublé ses exportations depuis 1990 ; et de nombreux autres pays ont réussi à maintenir ou à accroître leurs exportations de café alors que les exportations d’Haïti ont diminué.

  • Le riz et L’Insécurité Alimentaire En Haïti

    Le riz et L’Insécurité Alimentaire En Haïti

    L’évaluation internationale de la sécurité alimentaire du Service de Recherche Économique (ERS), indique qu’environ 70% de la population haïtienne était en insécurité alimentaire en 2014. Les autorités haïtiennes estiment que les importations représentent 80 à 90% de la consommation de riz en Haïti. Les importations de riz ont augmenté depuis 1986, quand Haïti a commencé à ouvrir son marché au riz importé. Avant cela, le pays ne consommait que de petites quantités de riz et était autosuffisant. Si beaucoup pensent que l’agriculture est un secteur clé pour Haïti, avec la possibilité de réduire la pauvreté rurale et d’accroître la sécurité alimentaire, le secteur est confronté à de nombreux défis, tels que l’ouverture du marché à des importations bon marché, le manque d’accès au fonds de roulement et des infrastructures insuffisantes.

    Selon le Département de l’agriculture des États-Unis, Haïti est l’un des plus grands marchés pour le riz usiné à grains longs du Sud des États-Unis. Haïti, pays le moins développé à intégrer pleinement dans la CARICOM a le tarif le plus bas sur les importations alimentaires dans la région. Les facteurs macroéconomiques ont créé un avantage de prix significatif pour le riz importé sur le marché haïtien. Le pays a ouvert son marché aux importations de riz en 1986 et en 1995.

    En 1986, Haïti a d’abord éliminé les restrictions quantitatives sur les importations de riz, mais l’a remplacé à un droit d’importation spécifique de 70 dollars la tonne par un droit ad valorem de 50 pour cent. Les importations sont passées de seulement 7 000 tonnes métriques en 1985 à 25 000 tonnes métriques en 1986, les États-Unis étant le principal fournisseur (USDA, base de données PSD).

    En 1995, Haïti a réduit ses droits de douane sur le riz étranger de 50% à 3%. En outre, un petit nombre d’importateurs politiquement influents dominent le marché. Les importations de riz d’Haïti représentent maintenant 80% de la consommation. Peu d’efforts sont en cours pour améliorer les performances agricoles locales. Les importations de riz sont ensuite passées à 207 000 tonnes métriques pour 140 000 tonnes métriques. La production nationale a stagné pendant la même période. La consommation de riz a presque quintuplé depuis 1985, tandis que la production a baissé.

    En outre, la production de riz en Haïti n’a montré aucune croissance à long terme au cours des 30 dernières années, après avoir légèrement augmenté entre le début des années 1960 et le milieu des années 1980, selon le rapport du Service de recherche économique.

    Alors qu’Haïti a ouvert son marché aux importations, qu’il n’offre que peu de soutien aux agriculteurs. De plus, les agriculteurs sont confrontés à des contraintes sévères en raison du manque d’accès au fonds de roulement. Le financement privé n’est disponible qu’à des taux d’intérêt excessivement élevés. De plus, les pertes dues aux capacités techniques et aux catastrophes naturelles, d’autres contraintes incluent la petite taille des exploitations, les conflits permanents sur la propriété foncière qui bloquent toute expansion ou consolidation des exploitations en unités plus efficaces, et enfin l’accès à l’eau incluant des canaux d’irrigation inadéquats sont également des problèmes majeurs auxquels les agriculteurs sont confrontés. Toutes ces contraintes sont quelques-unes des raisons du manque de compétitivité d’Haïti dans la production alimentaire, ce qui fait que le riz domestique est plus élevé que le riz importé.

    Incapable de parvenir à l’autosuffisance, Haïti importe la majeure partie de sa nourriture contrôlée par un petit nombre d’importateurs politiquement influents, laissant sa population vulnérable et fortement exposée à l’insécurité alimentaire.

    Regardez cette vidéo associée pour en savoir plus